L'histoire :
Confortablement installés dans leurs transats sur la banquise, devant leur igloo, deux pingouins sirotent pénards un cocktail. Finalement, il a du bon, ce réchauffement climatique. Quoique ça ne change pas grand-chose par rapport à avant. Avant, ils buvaient pour se réchauffer ; maintenant, c’est pour se rafraîchir. Par contre, c’est l’angoisse : ils n’ont plus de glaçons dans le congélo ! Plutôt que de céder à la facilité d’en faire par eux-mêmes en piochant alentour (ils sont sur la banquise !), madame pingouin préfère en commander sur Aglazon®. En plus, c’est super, le site propose un kit promo pour en faire soi-même avec de l’eau. Quitte à passer commande, elle achète aussi un second frigo, plus grand. Leur fils Noukia, qui a une conscience écologique exacerbée, leur reproche leur énième délire consumériste. Pendant ce temps, le président américain se commande une pizza juste avant de recevoir la célèbre climatologue Helen Lawrence. En effet, l’heure est grave : si les émissions de gaz à effet de serre continuent d’augmenter, il est possible que 70% du pergélisol de surface disparaissent… Ce qui risque d’entraîner une démultiplication des gaz à effet de serre, en relâchant dans l’atmosphère le carbone organique qu’il contient. La climatologue propose une mission scientifique d’urgence. Pendant ce temps, l’empereur des pingouins doit faire face à un vent de révolte : son peuple réclame des élections !
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Oui, le réchauffement climatique est une réalité tragique, étant donné que les gouvernements terriens sont incapables d’organiser son endiguement. Mais ça n’est pas parce qu’on va tous crever qu’on n’a pas le droit d’en rire. On fonce déjà droit dans le mur en klaxonnant, alors autant procéder au suicide collectif également en riant. Or ça tombe bien : faire rire est la vraie spécialité de Jorge Bernstein. Dans le dedans de ce petit bouquin carré (plus c’est petit, moins ça nécessite de papier, donc moins ça coûte en arbres !) de la facétieuse collection Pataquès, Bernstein met en scène des pingouins sans scrupule (et un peu mexicains sur les bords), un président américain débile (alter ego de Trump), un empereur des glaces mégalomane, une journaliste arriviste et une climatologue qui s’arrange bien comme ça l’arrange avec sa conscience écolo. De la Maison Blanche jusqu’à la banquise en péril, tout ce petit monde délivre une centaine de gags en gaufrier (un par page, en 4 cases carrées), d’une causticité aussi efficace que sardonique, le tout dans une continuité narrative admirablement amenée. Les crayons souples de Nicolas Witko n’ont plus qu’à jouer la partition graphique caricaturale et comique qui convient, pour qu’on rie et pour qu’on rie vraiment. A lire un jour de canicule, en sirotant un cocktail avec des glaçons, à condition que votre conscience écolo vous l’autorise.