L'histoire :
L'offensive allemande de l'été 1914 ne s'est pas bien passée pour les troupes françaises. La stratégie de contre-offensive de Joffre a été battue en brèche par l'intelligence tactique de l'assaillant. Il n'y aura pas de résistance héroïque dans la Marne, et très bientôt Poincaré signe l'armistice. La France est occupée et Clémenceau, exilé à Alger, forme un gouvernement de résistance. À la tête d'une flotte redoutable, le vieil homme politique sait pourtant que son seul moyen d'envisager une libération est que le front de l'Est tienne bon. Pour cela, il n'imagine pas un instant que le tsar Nicolas II aura l'envergure nécessaire. En revanche, il voit dans la force révolutionnaire qui gronde en Russie un allié potentiel contre l'Allemagne. Il va alors imaginer un assassinat organisé, pour lequel il lui faudra un homme capable de tout, sans scrupule face à la violence armée, et courageux. Le portrait craché d'un des bandits les plus célèbres du début du siècle, celui qui a longtemps tenu tête aux fameuses Brigades du Tigre : Jules Bonnot lui-même, le patron de la bande du même nom, qu'une manipulation du pouvoir à gardé au secret dans une prison du château d'If, alors que la France entière le croyait mort...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Même le lecteur avec le plus modeste bagage en Histoire de France comprend vite la portée de cette uchronie qui voit Clémenceau concevoir un complot international pour faire assassiner le tsar Nicolas II. Faire entrer en jeu un criminel anarchiste dans ces années de grands bouleversements est encore plus brillant et drôle, et conduit le lecteur à se laisser emporter par tant de culot. Jean-Pierre Pécau et Fred Duval orchestrent un beau défilé de personnalités connues, que les caractères accentués au second degré rendent étonnamment proches. Bonnot et le commissaire Blondin sont de vrais héros d'aventure, comme les baroudeurs des séries grand-public des films à succès. Ces improbables alliés de circonstance pimentent toutes les situations des contrastes de leurs personnalités. Et les passages où Bonnot ne supporte plus la rhétorique de Trotski sont un vrai régal irrespectueux. Ces deux tomes réunis des tout premiers épisodes de Jour J (tomes 3 et 4) offrent un fantastique moment d'évasion, une lecture cohérente et formidablement intelligente. Les auteurs poussent la digression historique bien plus loin que la défaite française dès 1914, ou l'incroyable résurrection de Bonnot, sans jamais alourdir leur propos de citations appuyées. Les péripéties se multiplient, parfaitement mises en scène par Florent Calvez, dont le dessin parfois emprunté offre pourtant des planches pleines d'énergie et parfois réellement gracieuses.Cette intégrale qui sort à point nommé quelques jours avant l'anniversaire de la révolution russe, nous rappelle à quel point Jour J peut être une série brillante. Ces deux volumes rassemblés faisant définitivement partie des plus réussis de cette passionnante collection.
