L'histoire :
Ce 05 juin 1968 aurait pu signer la fin de toute ambition politique pour Bobby Kennedy, à l'hôtel Ambassador de Los Angeles. Après la fin de son discours et alors qu'il traverse les cuisines pour aller plus rapidement en salle de presse, un homme braque une arme dans sa direction. Mais un employé des cuisines voit la scène et stoppe l'assaillant d'un énorme coup de poêle en pleine tête. Les gardes du corps maitrisent l'inconnu, et Bob Kennedy remercie son sauveur. Frank Lincoln Junior, dit Link, n'est pas très causant lorsque le candidat lui propose de devenir un de ses gardes du corps. Frank est noir, il connait l'injustice que vivent les gens de couleur dans son pays, il ne sait pas trop quelle place il pourra occuper, mais face à l'insistance de Kennedy, et aussi parce qu'il est sensible à ses discours, il accepte. Il rejoint l'équipe de campagne et il est chargé de l'enquête autour de Sirhan Sirhan, l'homme des cuisines de l'Ambassador. Comment savait-il que Kennedy allait passer par les cuisines pour aller en salle de presse ? Ce qui est sûr, c'est que Sirhan ne donnera pas la réponse lui-même, il a pris une balle en tentant – selon la version officielle – de s'échapper de la voiture de police qui l'emmenait...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Les Kennedy sont une source inépuisable d'intrigues passionnantes. L'assassinat de John, puis celui de son frère Bob, restant en partie entourés de mystère. Le choix de Jean-Pierre Pécau et de ses acolytes Fred Duval et Fred Blanchard est d'imaginer que Bob Kennedy a survécu à l'attentat au cours duquel il a effectivement trouvé la mort. Il venait de gagner la primaire démocrate, il était donc candidat pour les présidentielles. Le démarrage de l'album est hyper prenant, nerveux, percutant. D'emblée, les dialogues font mouche pour mettre en scène la relation entre Link et Bob. Denys, au dessin, fait un excellent boulot, très bien séquencé et d'une fluidité parfaite. Les couleurs de Scarlett conviennent parfaitement à son trait dense et ses plans toujours assez rapprochés. L'album se dévore sans qu'on prenne le temps de se poser de question sur les éventuels raccords avec l'Histoire telle qu'elle s'est vraiment déroulée. Le contexte de la lutte pour les droits de la communauté noire, les émeutes de Watts qui sont encore très récentes, le passé au Vietnam de Link, tout cela construit un fond très solide qui nous attrape avec une belle efficacité. Ce 48ème album de Jour J est un des tout meilleurs, une excellente utilisation du concept de l'uchronie. Une suite nous attend... on trépigne déjà.