L'histoire :
Paris, 1875. Justine, une fille mère sans le sou, confie son bébé en adoption à un couple de braves bouchers. Ces derniers élèvent dès lors le petit Tristan avec amour, comme s’il s’agissait de leur propre fils, sans jamais lui révéler la vérité sur son origine et… sa difformité. Car Tristan est né avec une horrible déformation au bas du visage, qui l’empêche de parler et l’oblige à porter en permanence une minerve. Cette difformité lui vaut d’être exclu des autres enfants de son âge. Malgré la bonne instruction et la gentillesse de ses « parents », il évolue donc un peu en marge de la société. En grandissant, il se découvre des talents d’artiste peintre et se spécialise dans les œuvres réalisées à base de sang et d’organes de bœuf… Adulte, il se renferme totalement sur cet art très difficile d’accès et entretient à l’égard de la gent féminine des rapports très tendus, essentiellement en raison de cette différence physique répulsive. Pourtant, Mathilde, une jeune bourgeoise qui évolue dans le milieu très fermé des critiques d’art, voit en lui le génie pictural et décide de le révéler au grand public…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Voici donc le troisième Secret(s) de famille enfoui, sur le point d’être révélé au grand jour par Frank Giroud, docteur es thriller au sein du 9e art – cette fois en duo scénaristique avec Florent Germaine. Sur le même principe que Le serpent sous la glace (2 tomes parus sur 3) ou L’écharde (1 sur 2 de prévus), L’écorché couvrira 2 albums. Ce premier volet nous plonge avant tout dans une superbe reconstitution d’époque, celle de la construction de la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre, soit l’âge d’or de l’art parisien. En 62 superbes planches, Ruben Pellejero (un peu de fumée bleue, le tour de valse) met tout son talent graphique dans la restitution des mœurs, des costumes, des bâtiments fraîchement construits pour la fameuse exposition universelle. Son trait léger et précis et sa colorisation chaude sont idéals pour retranscrire l’émulation artistique sans pareille de la fin XIXe. Côté récit, nous découvrons un héros muet véritablement poignant. De par sa difformité, Tristan vit à l’écart de la société et s’est enfermé dans un art exclusif. Il y a une dichotomie intéressante entre sa sensibilité artistique et la violence qu’il rumine de par le rejet qu’il inspire. Un rapport évident entre sa désolation et les techniques particulières qui l’inspirent (du sang et des viscères). Pour le moment, nous compatissons à ses côtés, sans partager pleinement le poids d’une difformité toujours masquée aux yeux du lecteur. Est-ce par pudeur ? Est-ce pour le suspens ? L’intrigue en elle-même ne semble pas s’arrêter au secret de son adoption : une enquête discrète (mais malheureuse) devrait déboucher au prochain épisode sur des révélations fracassantes. En attendant, comme toujours chez Giroud, on est drôlement tenus en haleine…