L'histoire :
Juif khazar mort durant la Shoa, Jules se retrouve soudain 60 ans plus tard, à la gare de Bruxelles, en train d’intercepter une beurette voilée, Fadya. Par un jeu de séduction – et grâce à la technologie bluetooth de son portable – il parvient à l’attirer dans une chambre du Hilton. Là, au 25e étage de l’hôtel, devant une baie vitrée donnant sur le ciel bruxellois, il parvient contre toute attente à lui faire l’amour. Il sait qu’elle dissimule une ceinture d’explosifs autour de la taille. Elle a été préparée par son frère à cette « mission divine », censée servir de symbole contre la guerre en Irak, imminente. A l’extérieur, défile une gigantesque manifestation populaire pour la paix. Il faut qu’elle rejoigne cette foule, au milieu de laquelle un message GSM de son frère doit déclencher l’explosion. Bouleversée par son inqualifiable dérive sexuelle, Fadya part accomplir sa mission. Mais au moment de sortir de l’hôtel, elle s’aperçoit que 3 jours se sont écoulés en quelques minutes. Sur l’écran de télévision du hall d’hôtel, les images se bousculent. La guerre est désormais bien entamée. C’est trop tard. Elle retourne voir Jules, officieusement pour recharger son portable, et se livre avec lui à une interminable débauche de sexe…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Impuissant devant l’inéluctable détermination du gouvernement Bush à renverser le régime de Saddam Hussein, Bernar Yslaire impose via ce joli diptyque, sa réponse à la guerre, en Irak et en général. Pour ce faire, il s’appuie sur la chanson Imagine de John Lennon et sur son fameux « bed-in ». Le chanteur employa en effet en 1971, une méthode très particulière de revendication pacifiste pour s’opposer à la guerre du Vietnam : il se filma dans une chambre du Hilton d’Amsterdam, en train de faire l’amour avec Yoko Ono. De la même manière Jules et Fadya sont ici des Roméo et Juliette des temps modernes, avec un Roméo juif fantôme et une Juliette islamiste kamikaze. Le récit reprend après que Fadya se soit faite sauter (dans tous les sens du terme…), d’où le titre. Dès lors, la trame n’est pas très compliquée : sur fond d’ésotérisme, tandis que le temps et l’existence ne sont plus vraiment des données fiables, Yslaire alterne les images d’actualité qui défilent sur la télé et les pures scènes de fornication. Si le propos est on ne peut plus louable, le récit demeure bien nébuleux. Sur l’argument de l’ésotérisme, on s’affranchit de bien des explications encombrantes. Ensuite, qui dit débauche de sexe, dit effectivement qu’il vaut mieux réserver l’ouvrage à un public averti : les scènes d’amour sont très suggestives. Quelques pudibonds rougiront de cette pornographie sensée et assumée, mais ces images sont toujours moins obscènes que la guerre en elle-même : si tout ce qui est dessiné est imaginaire, les extraits de reportages sont hélas bien réels. Les puristes du 9e art s’agaceront sans doute de l’abus de photos… Les séquences dessinées, très réussies, confirment néanmoins tout le talent d’Yslaire, notamment pour l’érotisme !