L'histoire :
Chaque nuit, les cauchemars de Bernard-Marie Sambre sont plus durs, plus oppressants, plus horrifiques. Ses ancêtres, borgnes ou aux yeux rouges baignés de sang, partagent leur haine et leur souffrance avec le jeune garçon. Hanté par ses ascendants, Bernard-Marie rassemble chaque jour les portraits de la maison familiale et dessine, retrace cette guerre des yeux que son grand-père Hugo a écrite. Sa tante lui inculque une discipline de fer. Sa mère, Julie Saintange, s’est enfuie sous un faux nom outre-manche, dans le Sussex où elle est recueillie par sa belle-famille. Le père de son futur enfant est décédé, elle est désormais Jane Shagreen. Judith, elle, est dans un pensionnat pour jeunes filles. Elle aussi fait des cauchemars. Elle est réveillée par deux gamins des rues, Giuseppe et Kazimir. Contre une pièce et un chocolat, la petite fille dévoile son corps au beau Giuseppe, pendant que Kazimir les espionne avidement. Le lendemain, contre toute attente, alors que Judith est une rebelle qui refuse de bien se tenir et se laver le jour des visites, elle est adoptée par la famille Belgrand de Polignac.
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Premier tome du triptyque consacré à la troisième génération de la famille Sambre, dans la série qui est la colonne vertébrale de l’immense toile familiale qu’a tissée Yslaire autour des Sambre, la terrible famille aux yeux de sang. Yslaire est d’ailleurs désormais seul à signer scénario et dessins de cette série centrale. Si l’album s’ouvre sur Bertrand-Marie et continue sur Julie, c’est finalement l’histoire de la petite Judith qui prend la majeure partie du récit. Elle pourrait vivre un conte de fée, adoptée par une famille riche et aimante... mais mauvais sang ne saurait mentir : elle se retrouve vite à la rue, voleuse et pervertie. Comme d’habitude, Yslaire nous peint l’implacable nature de ses héros atteints d’un déterminisme de débauchés malhonnêtes et violents. La petite fille ne fait pas exception et très vite, sa petite figure angélique révèle une nature corrompue. C’est une nouvelle ambiance pesante, grave et dure qui est portée par l’utilisation d’une bichromie dégradée de rouge et de noir, à la fois mélancolique et donnant une impression légèrement surannée. Le trait est précis, dynamique et le découpage toujours rythmé et diversifié. Le récit est particulièrement efficace, avec des rappels à Bernard-Marie et Julie, et surtout les découpages des cauchemars du jeune homme, qui semble jusqu’alors étrangement sain. Même si le parcours de Judith est assez scabreux, on est plus porté par l’intrigue que par le côté choquant des personnages, ce qui peut arriver dans certains tomes de la série ou de ses petites sœurs. De fait, on lit ce 7ème tome avec plaisir, comme une histoire d’aventures presque normale dans ce monde terrible des sang-sombre. Mais toujours, plane la lourde menace…