L'histoire :
Par une nuit de pleine lune, un vieux sage sans visage fume son calumet, assis en tailleur sur son tapis au pied d’un gros arbre. Au même moment, un carrosse-prison convoyé par des cyclopes barbus file à vive allure sur un sentier forestier. Il est poursuivi par des cavaliers cyclopéens cagoulés. Au terme d’une harassante poursuite, les seconds rattrapent et attaquent les premiers. Ils viennent à bout des soldats à coups de sabres et défoncent le bois du carrosse à coups de hache. Ils libèrent ainsi leur ami, un colosse enchaîné avec zèle. Ce colosse fête son retour à la liberté en faisant des câlins à ses sauveurs, mais aussi en écrasant les boîtes crâniennes des deux geôliers survivants l’une contre l’autre. Son meilleur ami, qui a mené le raid meurtrier, lui donne un mouchoir pour essuyer le sang qui lui a giclé au visage. Ils repartent tous ensemble à cheval, fin heureux de leurs retrouvailles, pour reprendre aussitôt leur vie de brigandage. Ils s'en vont piller le trésor situé sur un bateau qui mouille discrètement dans un fleuve, à quelques encablures du port. Lorsque les troupes du sultan arrivent peu après derrière, ils constatent le carnage. Carrosse éventré, corps en charpie. Pire : c’est le bateau en flamme qui contenait leur trésor qui dérive jusqu’au port pour y sombrer définitivement…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En 2020, Stanislas Moussé s’était quelque peu fait remarquer avec Longue vie, en raison de son mode de dessin – des pleines pages bien remplies de détails de déco au rotring, à la limite de la texture – et de son mode narratif original et muet – proche de l’écriture automatique. Puis avec Le fils du roi (2020) et Mater (2021), il avait réitéré cette « façon » totalement originale… mais dont la récurrence mettait aussi en évidence les limites de son concept. Pleine lune est un peu la goutte qui fait déborder le vase. Cette fois Moussé se rapproche de ses personnages et de leurs aventures, mais c’est hélas pour constater qu’elles sont très sommaires… quand on les comprend. Dans un contexte médiéval-fantastique, de nouveaux combattants cyclopéens et patatoïdes se querellent sauvagement et visuellement – sans le moindre dialogue. Il y a surtout des guerriers, dont un colossal, les uns barbus, les autres chauves, mais aussi une prostituée pouilleuse. Globalement, deux armées s’entretuent à grands renfort d’hémoglobine. Et comme si cela ne suffisait pas, un monstre chtonien et lacustre plein de tentacules, de dents pointues et de griffes acérées rajoute sa petite barbarie. Ils se livrent à ces exactions horribles de nuit, éclairés par la pleine lune pour justifier le titre et qu’on puisse tout bien voir. Et le vieux sage qui fume son calumet, dans tout ça ? Heu… on vous a dit qu’on ne comprenait pas tout ?