L'histoire :
Cliff, Mitz, Willy font partie des Black Badge, une troupe de scouts un peu particulière. Venus se greffer à un autre groupe lors d'un voyage à Séoul, sous prétexte de manque de moyens, les quatre copains, avec Kenny, dernier intégré, vont rapidement faire bande à part et s'éclipser très loin, repérant un petit ensemble de baraques et donner ses coordonnées pour un bombardement par drone. Puis ils sortiront tranquillement de la zone pourtant interdite, évoquant s'être perdus auprès des militaires venus les contrôler. Après un débriefing, ceux-ci vont enchaîner et prendre le train pour la Sibérie, où les attend une autre mission. Cependant, il y a un os : une autre troupe apparemment aussi entraînée qu'eux est présente à bord et il va falloir négocier. Les Mounties sont là pour les surveiller. Font-ils partie du même bord où sont-ils des concurrents, avec lesquels il va falloir jouer, pour le pire ? Le doute s’installe et les chasseurs vont vite devenir proies...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Rarement comics aura utilisé le principe du chapitrage avec autant d'acuité, ceux-ci rythmant chacune des nouvelles missions de cette troupe de jeunes gens. Petit à petit, Matt Kindt, le scénariste, nous immerge profondément au sein de cette organisation basée au camp Wayword, gérée par Gottschalk. Au fil de flashbacks sur chacun des protagonistes, il dévoile leur caractère propre, voire leur genre, ainsi qu’un réseau complexe. Au cours des voyages, jusqu'en Asie et en extrême orient, il va être question de démêler le vrai du faux et se protéger contre les nombreux retournements de situations. Kindt a déjà abordé pleinement le sujet de l'espionnage et du détournement psychologique à l’occasion de Mind MGMT, une œuvre forte, quoi qu'un peu complexe, créée en 2015 mais parue en France le 19 mars 2020 (chez Mr Toussaint Louverture). De son côté, Tyler Jenkins, auteur de Snow Blind chez Glénat en 2019, a aussi assuré une très bonne série thriller rurale : Grass Kings, parue sous forme de trois albums chez Futuropolis la même année, déjà en collaboration avec son collègue. A nouveau associés, les deux auteurs donnent un assez bon aperçu de leurs univers respectifs. On reprochera juste peut-être la morale de cette dernière fiction qui, si elle dénonce fortement la thématique de la manipulation, n'évoque pas assez la raison pour laquelle le scénariste a souhaité écrire le destin de ces jeunes gens. Comme si notre société devait régler un problème avec cette génération. D'autant plus que le final tombe dans une vraie morale humanitaire, pour le coup, rendant d'autant plus caduque l'aspect rebelle que l'on avait pu ressentir au long des précédents chapitres, tel un Battle Royal cherchant ses marques du côté du Club des cinq. Les couleurs de Jenkins, qui nous avaient ravis dans Grass Kings avec ses aquarelles au top, sont comme engluées ici dans des tons de bleus et de rouges bien moins séduisants. Un peu dommage.