L'histoire :
Elle n’aimait pas les roses et c’est le seul cadeau qu’il lui ait fait : ils se sont connus si peu de temps, qu’elle n’a jamais pu lui dire qu’elle détestait ces fleurs là. Butchy est resté à la guerre, fauché par une balle en plein front. Il y a pourtant un autre cadeau qu’il lui laisse : un petit garçon qu’elle prénomme Craig et qui grandit si vite qu’elle se souvient de moins en moins de Butchy. Comme en un tour de passe-passe, le gamin, à 8 ans, est déjà presque aussi grand qu’elle. Les médecins consultés sèchent littéralement devant cette croissance rapide et inexpliquée. En attendant, Craig intègre l’équipe de basket locale et devient rapidement une véritable curiosité. Et plus il grandit, plus il semble s’éloigner de sa mère… Devenu l’icône et le héros de sa petite ville, le voilà surmonté de ses 2.74 mètres, qui fait sa rentrée universitaire pour étudier le commerce et l’économie. Pour l’occasion, il signe un contrat lucratif avec une marque de vêtements de grandes tailles. Outre un joli salaire, on lui fournit aussi des tenues sur mesure. Et puis il rencontre la pétillante et jolie Jo…
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Après le remarqué Super spy, Matt Kindt se met dans les pas d’un géant, via la fausse biographie d’un homme qui ne cessera de grandir sa vie durant. Ce sont alors successivement sa mère, sa femme et sa fille qui le racontent, laissant leurs regards nostalgiques, aimant ou gorgé de frustration décrire cette destinée hors du commun… Dans cette Amérique des années 60, l’extraordinaire croissance de Craig Pressgang fascine. Aussi, le laisse t-elle faire les beaux jours de sa ville natale, des équipes de basket-ball, des publicitaires flairant le bon coup et bientôt même de la CIA. Cerise sur cet énorme gâteau de 3 étages, il y aura même une petite place pour une love story, un mariage et une jolie petite fille. Pour autant, au fil du temps, ce gigantisme pèse dans la vie de Pressgang, de tout son poids. Et ni le génie de son épouse (qui a usé de ses talents d’architecte pour faire une maison à sa dimension), ni la technologie mise à disposition par la CIA (lunettes, costumes grandissant avec lui, prothèses…) ne peuvent lui permettre de s’intégrer dans un monde qui n’est pas fait pour lui. Une seule solution : disparaitre et se fondre dans la masse, pour qu’on parvienne presque à l’oublier… Ainsi, sous ses aspects de conte fantastique et voyeuriste, L’histoire secrète du géant est une jolie manière d’aborder la différence et la difficulté à s’intégrer dans une société pas toujours adaptée à chacun (et ici dont la croissance du personnage principal est la parfaite métaphore de notre société de consommation). Silencieux et inexorablement passif, notre géant sait alors si bien transmettre cette mélancolie et ces angoisses chevillées, qu’il nous fait inévitablement porter sur l’Autre un regard différent. Le dessin particulièrement expressif et soutenu par une colorisation joliment lavée participe d’ailleurs beaucoup à nous faire prendre ce chemin.