L'histoire :
Meru, enfin autonome dans ses décisions, arrive à retrouver dans une grotte sous-marine le premier immortel et récupérer son parapluie magique. Elle doit faire preuve de beaucoup d’abnégation et de retenue afin de rassembler, tant bien que mal, une poignée d'espions-amis issus de l'agence, dont Henry Lime, Dusty et ses doubles, Duncan, le géant... et tous se dirigent vers Hong Kong, au quartier général du Mind Mgmt, où les attendent la bande de l'effaceur, prêts à en découdre. Évidemment, rien ne sera tel qu'il apparaît, et les surprises seront de mise afin de déstabiliser l'adversaire. Chacun laissant des plumes au passage, ou son mental, puisqu'il est question d'esprit...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
On l'a vu au fil des deux précédents tomes, mais aussi dans ses autres œuvres, Matt Kindt n'aime rien tant que les histoires compliquées, à tiroir. Ici, refermant ce qui restera comme son apothéose scénaristique, mais aussi graphique (n'oublions pas que Matt Kindt assure un dessin de toute beauté, maniant l'encrage et la colorisation comme peu savent se le permettre ; une école à lui tout seul ! ), il réussit à nous garder captifs et attentifs à cette histoire somme toute très humaine, aux personnages nombreux. Flashbacks, séances de rêve, interludes, découpes de journaux et phrases secrètes dans les marges ne sont pas suffisants à nous détourner d'un charme quasi magique, à la hauteur du récit et de son intrigue, aux multiples rebondissements. Ce Mind Management, sensé nous retourner le cerveau, tel un Inception graphique, n'est qu'un leurre au final, usant de stratagèmes certes, ceux-ci nous guidant cependant très adroitement vers le « niveau supérieur ». Que nous révèle t-il ? Sans spoiler aucunement, on pourra sans doute dire qu'il s'agit du bon niveau auquel un comics indépendant et son auteur peuvent se hisser, afin de délivrer une œuvre auprès de laquelle on prendra plaisir à revenir. Mention spéciale aux 24 pages « Évasion de Nova Zembla », traitant de la formation de l'Effaceur, traitées façon vieux comics de SF, sur un papier kaki étonnant, permettant une respiration bienvenue, en plein milieu de ce volume. Jamais le dessin de Matt Kindt n'aura paru aussi beau. Sur le fond, Mind Mgmt, traitant subtilement de super héros sans super héros, raconte finalement notre monde et ses défauts, ses mirages, ses drames et ses espoirs, nous invitant à croire en nos potentiels afin d'espérer voir un jour poindre de réels changements. Une œuvre complexe, nécessitant plusieurs lectures afin de tout appréhender, mais aux charmes et aux goûts multiples.