L'histoire :
En l’espace de quelques instants, le monde a basculé. Après avoir supporté les virus H1N1 et le SRAS, l’Humanité pensait être préparé mais le H5-G4 a emporté plusieurs millions de personnes en quelques semaines. Tous les moyens de communication sont progressivement tombés et des petits groupes armés se sont mis à prendre le pouvoir un peu partout. Le Docteur Singh a perdu sa femme et sa fille mais étant un homme de science, certains ont vu de l’intérêt à le garder en vie et à lui offrir la possibilité de trouver un remède à l’apparition de ces êtres hybrides. Malgré ses tentatives, il n’avança aucunement mais lorsque Gus lui fut confié, il sut que le monde allait changer. Ce petit garçon à cornes de cerf prétendait avoir 9 ans, soit deux ans avant le drame mondial, mais le plus surprenant est qu’il n’a pas de nombril. Enfermé dans une cage avec d’autres hybrides, Gus reçoit de la part d’un surveillant une barre chocolatée qu’il partage avec ses amis. Singh a beau réfléchir dans tous les sens, si Gus n’est pas le résultat du virus, n’en serait-il pas la cause ?
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Lorsque l'on plonge pour la première fois dans un album écrit et dessiné par Jeff Lemire, on ne s'attend pas à être cueilli par le flux d'émotions ou l'intelligence qui s'y trouvent. Sweet Tooth a mis quelques années avant d'être publié en France mais peu importe tant l'histoire proposée se révèle d'une puissance aussi incroyable. Ce second tome s'ouvre sur un épisode éprouvant et instructif dans lequel le Docteur Singh revient sur l'apparition du virus qui a ravagé le monde et créé des êtres hybrides. Jeff Lemire évoque cela tout en nous montrant le sort réservé à Gus et ses amis. Cette entrée en matière est juste parfaite et nous remet immédiatement dans l'ambiance. Cet univers post-apocalyptique sert de décors à une histoire puissante où la nature même d'humanité est mise à mal. Le périple de Gus est bouleversant et les coups du sort nombreux. Ce petit garçon orné de bois de cerfs est d'une candeur touchante et le voir confronté sa vision naïve à un monde violent et impitoyable est superbement narré par Jeff Lemire. Comme toujours avec l'artiste, certaines planches sont pour lui l'occasion de tester des découpages atypiques et servant merveilleusement la narration. Le style de dessin de Lemire n'est pas immédiatement accrocheur. Pourtant lorsque l'on débute la lecture, ceux-ci apparaissent comme une évidence. Gage d'un travail réussi. C'est le cas aussi de Jose Villarrubia, qui comme il le dit dans la préface, signe là sa prestation la plus longue sur une série. Son travail est un modèle tant il parvient à mettre en lumière les aspects les moins évidents du trait de Jeff Lemire. Sweet Tooth continue d’être une œuvre remarquable, de celle qui nous inscrit plus profondément au fond de notre âme la citation du fabuleux penseur fictif Timothée Gustave, « il faut cultiver la différence, et non l’indifférence » !