L'histoire :
Une jeune femme dotée de longs cheveux bruns se trouve assise sur le sol en chemise de nuit, face à une porte fermée. Elle tente d’en tourner la poignée, mais la serrure reste bloquée. Elle renonce donc et s’en retourne s’assoir, circonspecte devant cet accès impossible. Elle finit par s’endormir sur le sol. A son réveil, le problème s’est amplifié : soit elle a rapetissé, soit la porte s’est agrandie... Toujours est-il que la jeune fille est désormais trop petite d’une dizaine de centimètres pour en atteindre la poignée ! La frustration est d’autant plus grande. Elle semble renoncer définitivement, lorsqu’une pichenette lui est donnée dans le milieu du dos. Elle se retourne : personne. Puis une autre, de l’autre côté. La volte-face est alors plus vive... mais encore une fois, il n’y a personne. La jeune femme reste alors concentrée, en alerte maximale... Elle repère ainsi le moment où cette main invisible s’apprête à lui donner une troisième pulsation dorsale... et, hop, elle l’empoigne ! Elle découvre alors une main qui sort de nulle part, comme d’un voile de brouillard très épais... une main qui disparaît en quelques secondes. Ça alors ! Les pichenettes recommencent, plus nombreuses, plus agressives, de toutes parts, jusqu’à la faire choir sur le sol...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
En anglais, Now signifie « maintenant ». Il faut assurément appréhender ce roman graphique entièrement muet comme un exercice onirique qui tente de saisir l’être présent, une quête de sens métaphysique et psychologique, quelque part entre l’angoisse existentielle et l’intériorisation organique. Oui, je sais, c’est flou, mais l’intention de l’auteur thaïlandais Art Jeeno l’est tout autant... bien qu’elle ne soit pas inintéressante. En premier lieu, s’agissant d’un roman graphique entièrement muet, le dessin en noir et blanc réalisé au crayon, circonscrit par des cases aux bordures tracées à main levée, est soigné et réaliste dans les proportions et les postures du personnage central. Une simple porte et quelques émanations oniriques (une cellule humaine ?) tiennent lieu de décor, au milieu de fonds aussi blancs que l’évocation de l’infini, de l’au-delà ou du monde des rêves. Minimaliste, donc ! Le scénario s’évertue à vouloir faire passer la jeune femme par une porte fermée ou trop grande. En cela, elle est aidée par des mains venues de nulle part... puis cet absolu enfin atteint débouche sur d’autres questions tout aussi hermétiques. Une métaphore de la vie ? De la réalisation de soi qui débouche sur la mort, donc l’inconnu tendant vers la vie renouvelée ? O-ni-ri-que qu’on vous dit. Mais joli, planant, évanescent, qui laisse une impression douce-amère de plénitude et de vie vaine. Ok pour Now, mais after ?