L'histoire :
Quand il était enfant, Giacomo Foscari avait appris par son père que sa famille originaire de Venise était sans doute la descendance la plus pure du peuple italien. La figure de Mercure, dieu gardien des voyageurs, allait dès lors accompagner toute sa conduite de vie. A cette époque d’avant-guerre, Giacomo avait aussi sympathisé avec Andrea, un gamin des rues, une « mauvaise fréquentation », qu’il enviait tout de même pour son extrême liberté d’actes et de pensées. En 1993, au seuil de sa vie, Giacomo est revenu s’installer quelques temps à Tokyo, où il a longtemps exercé durant les sixties en tant que professeur d’Histoire occidentale pour des doctorants. Au cours d’une sorte de bilan de sa vie, il compare les deux cultures dont il est issu et qui l’ont imprégné. Il se remémore la statue léguée de Mercure, la montée du fascisme en Italie puis ses années d’enseignement à Tokyo. Il était capable de s’émerveiller tout aussi bien de la beauté d’un jeune serveur que de la voie de la Callas, ou de se saouler au saké pour la fête des cerisiers en fleurs...
Ce qu'on en pense sur la planète BD :
Indépendante et libre d’esprit, la mangaka japonaise Mari Yamazaki s’est exilée 10 ans en Italie, notamment pour y étudier la peinture aux Beaux-Arts de Florence. Cette époque a assurément été une source d’inspiration pour son best-seller Thermae Romae. En marge de cette série à succès, elle inverse paradoxalement sa propre immersion culturelle pour narrer Giacomo Foscari, l’histoire d’un enseignant italien venu s’implanter au Japon dans les années 60. Cette démarche permet avant tout à Yamazaki de faire des rapprochements entre les mentalités des deux pays et d’évoquer les tourments de l’Histoire. S’il est bien le vecteur de la narration, le héros (fictif) se pose néanmoins en observateur esthète, discret et passif. Même sur le plan politique, sa répulsion du fascisme est contenue. Ses souvenirs naviguent dès lors de flashback en flashback, de Venise à Tokyo. Des thématiques composites surgissent alors : la fascination pour les éphèbes (le serveur, la statue de Mercure...), la frustration de la liberté (le tempérament de Giacomo, issu de la « bonne société » italienne, est tout en retenue), le plaisir des belles choses (les cerisiers en fleurs, la voix de la Callas...), ou encore des sujets plus étranges comme la pédophilie. Si l’étude bi-culturelle n’est pas inintéressante, c’est ce sentiment d’un propos central flou qui prédomine dans ce premier tome. La mangaka propose des planches avec une économie d’arrière-plans côté décors, un panel d’expressions faciales restreint pour les personnages, et le dessin s'inscrit dans une veine manga très académique. Bref, les 190 pages de ce premier opus, publiées dans un sens de lecture occidental par les jeunes éditions Rue de Sèvre, ne sont pas (encore) convaincantes...